De même que les habitants d’un canton montagneux ne sont pas bien placés pour apprécier la hauteur absolue ou relative des sommets qui les environnent, et qu’ils doivent, pour en mieux juger, se placer à distance en différentes perspectives, ainsi se trouvent situés les contemporains par rapport aux hommes de génie qu’ils voient s’élever autour d’eux, et dont ils ne peuvent juger absolument la grandeur, parce qu’il leur faudrait les pouvoir considérer avec l’abandon des préjugés de leur époque et la perspective du temps. […] Mais Bossuet n’avait pas eu le temps de lire Molière, et il avait nécessairement confondu deux choses : les pièces de Molière, et les insipides et graveleuses imitations qui étaient jouées alternativement avec ses chefs-d’œuvre sur le même théâtre808. […] À ce point de vue, il n’a été vraiment compris de son temps que par deux hommes. […] Il condamna de tout temps la comédie « corrompue, » et voulut faire des spectacles un « .divertissement innocent827. » Il eut même quelquefois l’intention d’instruire, particulièrement dans le Tartuffe et dans les Femmes savantes. […] D’ailleurs, sans entrer dans la discussion des textes et des décrets par lesquels elle a condamné généralement la comédie et les comédiens, il est nécessaire de remarquer quelle n’a jamais vu là ni une question de dogme ni une question de morale proprement dite, mais simplement une question de discipline, qui par là même n’a point un caractère absolu, puisque l’Église a souvent modifié sa discipline suivant les temps et les pays.