Le long règne de Mazarin avait été celui de la fausseté et de la débauche ; une cour dissolue, une noblesse intrigante, un clergé sans mœurs, une bourgeoisie sans lumières, un peuple fanatique, tel était l’état de la société. […] On lie à force de grimaces une société étroite avec les gens du parti. […] Ce qu’on blâme dans lui devrait être précisément un sujet de louange : il parle comme on parlait alors ; son dialogue est celui des hommes qu’il voyait tous les jours ; il est absurde d’exiger de lui les phrases précieuses d’une société qui n’était pas la sienne, et la pruderie d’une langue raffinée qu’on use à force de la polir. […] Ne serait-ce point parce qu’il était jésuite, et que la morale relâchée de cette société semble avoir fourni à Molière quelques-uns des traits les plus heureux de son imposteur. […] Le Tartuffe de Molière est donc rajeuni et ses couleurs, loin de s’altérer par le temps, deviendront toujours plus vives et plus frappantes, parce qu’à mesure que le monde vieillit, la société se corrompt, et que l’hypocrisie des hommes sera toujours en raison de leur égoïsme et de leur perversité.