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18. (1747) Notices des pièces de Molière (1666-1669) [Histoire du théâtre français, tome X] pp. -419

Quiconque lit, doit sentir ces beautés, lesquelles même, toutes grandes qu’elles sont, ne seraient rien sans le style. […] Mais Molière, qui, par l’esprit supérieur qu’il avait reçu, était assuré que le nouveau genre qu’il voulait introduire était celui de la bonne comédie, sentit aussi qu’elle ne plairait qu’à force d’être entendue, il se raidit contre les difficultés, et les surmonta. […] Molière a si bien senti la faute qu’on lui reproche qu’il a eu grande attention, dans la seconde scène du premier acte, à donner à Cléante le caractère d’un fils très respectueux, et qui sent parfaitement ce que la nature exige de lui ; mais en même temps il l’a représenté passionné pour une jeune fille, et tremblant que l’extrême avarice de son père ne devienne un obstacle à son mariage. […] « [*]Molière ne laissait point languir le public ; toujours heureux dans le choix de ses caractères, il avait travaillé sur celui du Misanthrope, il le donna au public, mais il sentit dès la première représentation que le peuple de Paris voulait plus rire qu’admirer ; et que pour vingt personnes qui sont susceptibles de sentir des traits délicats et élevés, il y en a cent qui les rebutent, faute de les connaître. […] Molière sentit qu’il avait assez de force pour y soutenir un théâtre comique, et qu’il avait assez façonné ses comédiens pour espérer d’y avoir un plus heureux succès que la première fois*.

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