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4. (1852) Molière, élève de Gassendi (Revue du Lyonnais) pp. 370-382

Le doute méthodique, l’autorité du témoignage des sens niée, la distinction profonde de l’âme et du corps, la connaissance de l’âme plus claire que celle du corps, sont tour à tour l’objet de l’ironie de Molière, comme de l’ironie de Gassendi. […] Ainsi Armande dit à Henriette : Songez à prendre goût des plus nobles plaisirs, Et, traitant de mépris les sens et la matière, A l’esprit, comme nous, donnez-vous tout entière… Mariez-vous, ma sœur, à la philosophie. […] Si Philaminte est un peu perdue dans le monde de l’esprit, Chrysale n’est-il pas un peu trop absorbé dans celui de la matière ; et si Philaminte, Armande et Bélise ont tort de faire abstraction du corps et des sens, Chrysale n’a-t-il pas tort, de faire abstraction de l’esprit et de s’écrier : Mon corps, c’est moi-même ? […] Selon Armande, dans le parfait amour, on doit tenir la pensée Du commerce des sens nette et débarrassée, Ce n’est qu’à l’esprit seul que vont tous les transports, Et l’on ne s’aperçoit jamais qu’on ait un corps. […] Pour moi, par un malheur, je m’aperçois, Madame, Que j’ai, ne vous déplaise, un corps tout comme une âme; Je sens qu’il y tient trop pour le laisser à part : De ces détachements je ne connais point l’art, Le ciel m’a dénié cette philosophie, Et mon âme et mon corps marchent de compagnie.

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