À cette époque, Jean-Baptiste Rousseau, qui se trouvait posséder les manuscrits de la Jalousie du Barbouillé et du Médecin volant, les envoya tous deux à M. de Chauvelin pour l’édition complète de Molière que celui-ci préparait. […] Mais partout ailleurs, quoique présentant encore, quelques contradictions, au moins apparentes, difficiles à expliquer, il a une certaine grandeur satanique ou au moins néronienne qui impose singulièrement à l’imagination et qui trouble profondément la sensibilité, et il se trouve que les vers par lesquels le même Musset caractérise le Lovelace de Richardson, s’appliquent très précisément au Don Juan de Molière. […] La comédie c’est Philaminte altière et dominatrice qui a des prétentions à l’infaillibilité, qui prétend marier sa fille avec qui elle a choisi et qui en définitive éprouve cette défaite que c’est son mari si méprisé d’elle qui se trouve avoir eu raison et que c’est elle qui se trouve avoir été aveugle et sotte. […] Ceci dit pour poursuivre la nuance et pour être juste, puisque la vérité est dans les nuances, revenons et disons qu’en son ensemble et en sa couleur générale Molière est l’homme du bon sens moyen, l’homme de pensée impersonnelle, qui pense ce que tout le monde pense,-, ou qui se résigne à ne penser que cela et qui, si tant est qu’il s’y résigne, se trouve assez à l’aise dans cette résignation. […] Par là elle retombe dans le gros des personnages ridicules de Molière qui, quels qu’ils soient, font des sottises quand il se trouve quelqu’un à les gratter où cela les chatouille.