Chaque année, chaque jour amène avec soi sa comédie, et ce qu’on appelle la société, va changer, en vingt-quatre heures de vices et de ridicules, tout comme une habile coquette arrange et dispose, à son gré, les mouches de son visage et les fanfreluches de son habit. […] Heureusement qu’à chaque génération les vices et les ridicules renaissent comme la feuille de l’arbre au printemps, et que la comédie aussitôt recommence, nouvelle avec une génération nouvelle. […] Il ne faut pas les regretter, il ne faut pas non plus se trop féliciter de ces ridicules oubliés, et de ces vices disparus ; d’autres sont venus à la suite de ceux-ci ; nous n’avons plus Les Femmes savantes de 1666, nous avons les bas-bleus de 1830 et années suivantes. […] Ainsi, qui voudrait faire aujourd’hui la comédie : des Précieuses ridicules et des Femmes savantes, irait chercher ses modèles dans un milieu de bas bleus, cent fois plus dangereux, plus nauséabond et plus terrible que le bon Molière au temps de Louis XIV. […] Nous en avons encore, il est vrai, des uns et des autres, mais modifiés, et corrigés ; tantôt moins ridicules, et parfois plus odieux.