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131. (1706) Lettre critique sur le livre intitulé La vie de M. de Molière pp. 3-44

L’Auteur fait faire ici un personnage à Molière d’homme désintéressé et juste ; mais il me semble qu’il pouvait dissuader le jeune étourdi de prendre sa profession, sans lui en faire voir le ridicule et l’indignité : C’est, dit-il, la dernière ressource de ceux qui ne sauraient mieux faire, ou des libertins qui veulent se soustraire au travail : c’est enfoncer le poignard dans le cœur de vos parents, de monter sur le Théâtre : je me suis toujours reproché d’avoir donné ce déplaisir à ma famille : c’est la plus triste situation que d’être l’esclave des fantaisies des Grands Seigneurs ; le reste du monde nous regarde comme des gens perdus, et nous méprise. […] Eh bien, quand on n’en pourrait douter, qu’importe à la postérité d’avoir cette ridicule vérité dans la vie d’un homme dont elle ne cherchera jamais la bassesse ? […] Et bien, il n’y avait qu’à dire qu’il ne mourut point sur le Théâtre, c’en était assez : on l’aurait cru sans ces particularités ridicules : il faut bien qu’on le croie sur le reste, dont il ne dit pas la moitié de ce qu’il faut dire, par exemple, sur son enterrement dont il aurait eu de quoi faire un volume aussi gros que son Livre, et qui aurait été rempli de faits fort curieux, qu’il sait sans doute ; car pour être mystérieux avec esprit, comme l’Auteur, il faut savoir toutes les circonstances des faits que l’on rapporte.

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