Si les Auteurs doivent faire parler leurs personnages décemment, il est une décence qu’ils sont obligés d’observer eux-mêmes en critiquant les mœurs, les vices ou les ridicules de quelqu’un qui tient à un Corps respectable. […] Ils l’ont fait avec tant de malignité, d’acharnement & de mal-adresse, que les ignorants en ont pris occasion de jetter du ridicule sur la littérature en général, sans songer que, digne de respect par elle-même, les grands hommes qui l’ont cultivée, la rendent encore plus respectable. Par quelle fatalité les Auteurs ont-ils poussé la manie de se déchirer mutuellement jusques sur la scene, & de rassembler le public pour se tourner en ridicule ! […] Si Corneille avoit le ridicule de vouloir quitter le nom de ses peres, étoit-ce à Moliere à le lui reprocher, lui qui avoit quitté celui de ses parents pour le dérober à l’infamie à laquelle on vouoit encore dans ce temps-là, avec la plus grande injustice, & les comédiens & tout ce qui leur appartenoit ? […] Il connoissoit la manie que Moliere avoit de se faire peindre en Empereur Romain, lui qui étoit détestable sous un habit tragique ; & c’est sur ce ridicule qu’il l’attaqua.