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13. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

Dans ces sociétés animées par la conversation des femmes, tous les intérêts se placent par la parole entre toutes les frivolités ; la raison la plus solide, l’imagination la plus active y apportent leurs tributs ; les aines les plus sensibles y versent leurs effusions ; les esprits les plus affinés y apportent leurs délicatesses : là, tous les sujets se prêtent aux conditions que la conversation impose ; les matières les plus abstraites s’y présentent sous des formes sensibles et animées, les plus compliquées avec simplicité, les plus graves et les plus sérieuses avec une certaine familiarité, les plus sèches et les plus froides avec aménité et douceur, les plus épineuses avec dextérité et finesse, toutes réduites à la plus simple expression, toutes riches de substance et surtout nettes de pédanterie et de doctrine. […] C’était sous l’influence de l’heureux besoin dont les esprits étaient alors pressés, que s’ouvrait l’hôtel de Rambouillet aux gens de la cour ennemis des scandales, aux gens du monde poli de la capitale, aux gens de lettres de profession, aux esprits cultivés de toutes les classes ; c’était par cet intérêt que les femmes les plus distinguées y étaient amenées et reçues avec des hommes d’élite, par une des plus belles, des plus jeunes, des plus riches et des plus respectables femmes de la cour. […] Il ne faut pas confondre avec l’hôtel de Rambouillet qui appartenait à la famille d’Angennes, la maison de campagne que fit bâtir le nommé Rambouillet, riche financier, père de Rambouillet de la Sablière, le mari de cette dame de la Sablière célébrée par La Fontaine, Perrault, Fontenelle, Bayle, dont la maison était fréquentée par les hommes les plus aimables de la cour, les Lauzun, les Rochefort, les La Fare, les de Foix, les Chaulieu.

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