Elle répond que la chose sera facile, qu’elle fera semblant de tomber, et que le trouvant en ce moment à côté d’elle pour la relever, il pourra aisément l’embrasser ; leur projet réussit. […] Les dames l’ont blâmée, et l’ont été voir : elle a réussi sans avoir plu, et elle a plu à plusieurs qui ne l’ont pas trouvée bonne ; mais pour vous en dire mon sentiment, c’est le sujet le plus mal conduit qui fut jamais, et je suis prêt de soutenir qu’il n’y a point de scènes où l’on ne puisse faire voir une infinité de fautes. […] « M. de Vigarani, gentilhomme modénois, fort savant en toutes ces choses, inventa et proposa celles-ci ; et le roi commanda au duc de Saint-Aignan, qui se trouva lors en fonction de premier gentilhomme de sa chambre, et qui avait déjà donné plusieurs sujets de ballets fort agréables, de faire un dessein où elles fussent toutes comprises, avec liaison et avec ordre, de sorte qu’elles ne pouvaient manquer de bien réussir. […] Il faut tomber d’accord que s’il réussit mal à la comédie, il a quelque talent pour la farce, et quoiqu’il n’ait ni les rencontres de Gaultier Garguille, ni les impromptus de Turlupin, ni les bravoures du Capitan, ni la naïveté de Jodelet, ni la panse de Gros-Guillaume, ni la science du Docteur, il ne laisse pas de plaire quelquefois, et de divertir en son genre… Voilà, en peu de mots, ce que l’on peut dire de plus obligeant et de plus avantageux pour Molière ; et certes, s’il n’eût joué que les Précieuses, et s’il n’en eût voulu qu’aux petits pourpoints, et aux grands canons, il ne mériterait pas une censure publique, et ne se serait pas attiré l’indignation de toutes les personnes de piété. […] « Depuis que les modernes ont jugé, avec raison, que les dénouements en action réussissent beaucoup mieux que s’ils étaient en récit, comme ceux des anciens, il n’y a jamais eu, sur aucun théâtre de l’Europe, un dénouement aussi bien imaginé que celui-ci.