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89. (1840) Le foyer du Théâtre-Français : Molière, Dancourt, I pp. 3-112

La Princesse d’Elide est encore une comédie-ballet commandée par Louis XIV ; Molière eut si peu de temps pour l’exécuter, que le premier acte de cette pièce est en vers, tandis que les autres sont en prose ; ce qui la fait ressembler un peu aux comédies de Shakspeare, avec lesquelles, du reste, elle a plus d’un rapport. […] Un auteur satirique du temps, Marigny, en parlant de cette pièce dans une relation des fêtes de la cour, s’exprime ainsi sur son mélange de prose et de vers : « Il semblait que la comédie n’avait eu le temps que de prendre un de ses brodequins, et qu’elle était venue donner des marques de son obéissance, un pied chaussé et l’autre nu. » Cette remarque est fort spirituelle; Louis XIV était alors dans toute la force de sa passion pour La Vallière ; ce fut pour elle qu’il commença à agrandir Versailles. […] Molière avait en grande estime le vers, il en comprenait si bien la supériorité sur la prose ! […] C’est la même cadence que dans l’Amphytrion, et il ne manque en effet que la rime à cette prose, ainsi alignée. […] La prose nous paraît mieux convenir à la comédie de l’Avare que n’eussent fait les vers; elle s’adapte plus étroitement à tous les détails de la vie ordinaire, et Molière, qui possédait un tact si sûr, ne craignît pas de lutter avec le goût d’un public ami des vers.

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