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65. (1848) De l’influence des mœurs sur la comédie pp. 1-221

Les traits qui les atteignaient nous semblent moins piquants depuis que deux révolutions ont consacré les droits de chacun et fait reposer l’édifice social sur des bases plus équitables; mais pour juger de l’immense effet qu’ils produisirent, il faut se reporter au temps où les sept huitièmes de la nation avaient encore à souffrir cruellement de ces abus. […] Toléré encore à Paris, il ne peut plus se produire sur nos théâtres de province. […] Toutes ces situations, toutes ces péripéties dramatiques sont sans doute ménagées et traitées avec beaucoup d’art; elles émeuvent, elles font répandre d’abondantes larmes ; elles ont, nous ne l’ignorons pas, puissamment contribué au succès ; mais, néanmoins, nous persistons à le croire, elles font tache dans ce bel ouvrage, elles le déparent ; car, après tout, elles ne produisent que des effets vulgaires, indignes d’un talent supérieur, et qu’à ce titre M. […] On le concevrait de la part de Tartuffe si, dans une circonstance moins critique, et en présence beaucoup de personnes, il avait intérêt à produire sur elles une certaine impression ; mais ici rien ne l’oblige à faire du dramatique et à se poser de la sorte. […] Assurément il ne faut rien négliger au théâtre de ce qui peut concourir à l’effet, puisque, en définitive, c’est le but où tendent tous les efforts de l’acteur, et la mimique ainsi que les jeux de scène y contribuent sans doute puissamment; mais le véritable comédien devrait toujours avoir le courage d’y renoncer, quand les moyens propres à le produire ne sont pas d’accord avec la situation de son personnage et les sentiments qui l’animent.

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