Il est vrai que les canevas italiens et les romans espagnols t’ont guidé dans l’intrigue de tes premières pièces; que, dans ton excellente farce de Scapin, tu as pris à Cyrano le seul trait comique qui se trouve chez lui; que, dans le Tartufe, tu as mis a profit un passage de Scarron ; que l’idée principale du sujet de L’ Ecole des Femmes est tirée aussi d’une Nouvelle du même auteur; que, dans le Misanthrope, tu as traduit une douzaine de vers de Lucrèce; mais toutes tes grandes productions t’appartiennent, et surtout l’esprit général qui les distingue n’est qu’à toi. […] Boccace et d’Ouville en ont fourni les situations principales ; mais ce qu’on emprunte d’un conte diminue seulement le mérite de l’invention sans ôter rien au mérite de l’ensemble dramatique, dont la difficulté est sans comparaison plus grande. […] Le principal rôle est un Sganarelle, nom qui désignait, dans les anciennes farces, un personnage imbécile ou grotesque. […] En établissant la mésintelligence d’un mauvais ménage entre Sosie et Cléanthis, il donne un résultat tout différent à l’aventure du maître et du valet, et double ainsi la situation principale en la variant. […] Le principal caractère est bien plus fort que dans Plaute, et il n’y a nulle comparaison pour l’intrigue.