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80. (1848) De l’influence des mœurs sur la comédie pp. 1-221

Il intéresse enfin parce qu’il fallait, pour que la leçon de l’auteur fût efficace, que le caractère du Misanthrope exerçât au théâtre cette sorte de séduction qu’il exerce dans le inonde, séduction contre laquelle il a grand soin de nous prémunir, et dont chaque scène de son immortel ouvrage fait nettement ressortir les dangers. […] Cela n’était nullement supposable, et il a fallu toute l’imminence du danger qui menaçait sa famille, l’avenir perdu de la pauvre Marianne, et enfin l’impossibilité de détromper son mari par d’autres moyens, pour qu’elle s’y résignât. […] Ailleurs nous développerons plus au long cette remarque, mais il a bien fallu, pour que ce moyen obtînt constamment une pleine réussite, qu’il reposât sur l’observation profonde et vraie de la bizarrerie de notre nature. […] En effet, si Orgon avait à sa disposition le bâton qu’il cherche, le meilleur moyen à employer pour qu’il en fustigeât son fils serait assurément de paraître vouloir l’empêcher de s’en saisir, ou de le toi arracher des mains; mais dans la situation où se trouve Tartuffe, un tout autre sentiment dirige sa conduite. […] S’il est nécessaire, dans cette sortie de Tartuffe, pour que sa physionomie haineuse et vindicative, pour que sa parole menaçante, fassent plus d’impression sur les spectateurs, qu’il occupe le milieu du théâtre, n’est-il pas un moyen de l’y faire passer autre que celui indiqué par la tradition ?

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