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99. (1881) La philosophie de Molière (Revue des deux mondes) pp. 323-362

Mais peut-être est-ce une question de psychologie et de morale, autant que de goût, que de rechercher si Molière n’a pas dépassé la vérité, et chargé les couleurs dans sa peinture de Tartuffe comme La Bruyère l’en a accusé dans ce portrait d’Onuphre, qui passe avec raison pour une critique de Molière. […] Par exemple, dans la scène des portraits, où après s’être contenu longtemps pour ne pas faire scandale, il finit par éclater contre la méchanceté odieuse et perfide qui déchire les amis absents pour les accabler de caresses aussitôt qu’ils se présentent, n’est-ce pas Alceste qui a raison ? […] De plus, si, comme on le dit, Molière a pensé à lui-même dans son portrait d’Alceste, croit-on qu’il eût aimé à se tourner en ridicule si ce ridicule eût été du genre qui flétrit et qui abaisse, et non de ce genre qui se concilie avec la dignité de l’homme ? […] Enfin Oronte et les marquis achèvent ce portrait du monde : c’est, d’un côté, la jeunesse superficielle, frivole, vide, la fatuité sotte, le bavardage inutile, et la médisance élégante ; dans Oronte, il y a moins de légèreté et moins de frivolité ; mais ces défauts sont remplacés par la ridicule prétention d’un poète de salon.

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