C’est en mai 1664, à Versailles ; le jeune roi Louis XIV offre, en apparence aux deux reines, sa mère et sa femme, en réalité à La Vallière, ces fêtes de sept jours, les Plaisirs de l’île enchantée, demeurées illustres dans la légende dorée des fêtes. […] Je ferai remarquer que la Relation des fêtes qui, à ce qu’on croit, dans le passage relatif à Tartuffe, fut inspirée, peut-être rédigée par Molière lui-même, dit que le roi « défendit la pièce en public et se priva lui-même de ce plaisir, jusqu’à ce qu’elle fût achevée et examinée ». […] Tartuffe, lui, n’aura garde ; avec lui point de bruit ; des faits : l’autel peut être tranquille ; il ne dit que des messes basses ; et il se penche à l’oreille d’Elmire, plus onctueux que jamais, avec le regard de côté de ses yeux dévots, ses lèvres grasses troussées par un sourire d’intelligence, et il promet De l’amour sans scandale et du plaisir sans peur… Dans tout cela l’intention comique est évidente ; elle éclate dans le contraste entre cette langue angélique et le gaillard au teint de rubis qui la parle ; dans l’inaltérable confiance avec laquelle il offre son cœur, dans cette naïveté de prêtre avec laquelle promettant du plaisir, du plaisir sans crainte, il se croit dès lors irrésistible ; dans l’admirable choix des mots et des rimes : car quoi de plus drôle que ces expressions : les vains efforts de mon infirmité, les tribulations de votre esclave indigne , et cette fin de déclaration : Et je vais être enfin, par votre seul arrêt, Heureux si vous voulez ; malheureux s’il vous plaît ; dont la dernière syllabe ne peut pas se dire autrement que la bouche bée ?