De quelque manière que se soit opéré ce changement, il écrivit sur Le Misanthrope une lettre toute admirative, que Molière ne dédaigna pas de placer en tête de sa comédie ; et c’est un honneur dont je n’ai pas voulu qu’elle fût privée dans cette édition. […] De tous ces noms inscrits par la malignité contemporaine au bas des portraits placés dans Le Misanthrope comme en une vaste galerie, quelques-uns nous ont été conservés par la tradition ; mais ou ils vont mal aux figures, ou ils sont trop peu connus pour intéresser notre curiosité. […] Molière, voulant ouvrir un champ vaste et fertile à la satire des vices et des ridicules, élargit, pour ainsi dire, la scène jusque-là resserrée de manière à ne permettre que le développement de quelque travers particulier, y transporta, non plus une famille, une coterie, mais la société presque entière, et plaça, au milieu de cette foule de personnages, un censeur de leurs défauts, atteint lui-même d’une manie sauvage qui l’expose justement à la risée de ceux mêmes dont il condamne légitimement la’ conduite et les discours. […] Benserade composa le Ballet des Muses, cadre ingénieux et vaste, où venaient se placer naturellement les merveilles de tous les arts.