Le Festin de Pierre avait été représenté la première fois tel qu’on le lit dans cette édition, c’est-à-dire avec la scène ou Sganarelle argumente contre son maître en faveur de Dieu, et celle où dom Juan, rencontrant un pauvre, lui donne, au nom de l’humanité , un louis d’or que celui-ci refusait de gagner par un jurement. […] Il est certain toutefois que, dans le temps, un de ces exemplaires ou du moins une copie manuscrite fut envoyée de Paris en Hollande ; car Jacques Le Jeune, libraire d’Amsterdam, qui, en 1683, avait imprimé Le Festin de Pierre en vers, de Dorimond, pour celui de Molière, donna, la même année, la pièce de Molière même, avec les scènes et les passages supprimés ou adoucis ; et ce qu’il y a de vraiment extraordinaire, c’est que cette édition hollandaise, qui fut suivie de quelques autres, resta presque aussi inconnue que les exemplaires non cartonnés de l’édition de Paris, puisque, cinquante ans après (en 1730) Voltaire crut faire une révélation au public, en lui donnant quelques traits de la scène du pauvre qu’il déclarait avoir lue écrite de la main de l’auteur, entre les mains du fils de Pierre Marcassus, ami de Molière.