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18. (1836) Une étude sur Molière. Alceste et Célimène (La Revue de Bordeaux et Gironde unies) pp. 65-76

Ce penchant eut plus d’une fois prise sur l’âme de Molière, les biographes nous l’attestent ; mais nous ne parlerons que de la passion qui domina toute sa vie, qui lui causa tant de souffrances, qui nous valut les plus beaux traits d’Alceste et la création de Célimène. […] Je n’eus que trop de moyens de me convaincre de mon erreur; et la folle passion qu’elle eût quelque tems après pour le comte de Guiche, fit trop de bruit pour me laisser dans cette tranquillité apparente. […] Ma passion est venue à un tel point qu’elle va jusqu’à entrer avec compassion dans ses intérêts; et, quand je considère combien il m’est impossible de vaincre ce que je sens pour elle, je me dis en même tems, qu’elle a peut-être la même difficulté à détruire le penchant qu’elle a d’être coquette, et je me trouve plus de disposition à la plaindre qu’à la blâmer. […] La mission sociale de la femme est tout autre ; elle sert de lien à la société humaine dont le faisceau pourrait être sans cesse’ rompu par les passions divergentes des hommes. […] Le poète observateur a voulu peindre l’homme tel qu’il est, l’homme avec ses passions, ses instincts de bien et de mal, ses sentimens de calme et d’agitation, d’abattement et de courage; l’homme, en un mot, ondoyant et divers, celui qu’a si bien étudié le philosophe Montaigne.

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