Fénelon se contente de reprocher à Molière, d’une manière générale, « qu’il a donné un tour gracieux au vice, avec une austérité ridicule et odieuse à la vertu ; » et il lui fait ce reproche aussi légèrement qu’il l’accuse de parler « souvent mal, d’approcher du galimatias, » et d’avoir été « gêné par la versification française812. » Il semble n’avoir lu qu’en courant, et pour pouvoir dire qu’il les connaissait, les ouvrages qu’il juge avec une autorité si absolue et si brève. […] Parler à une nation le langage du bon sens, c’est, fortifier son esprit ; le parler jusque dans la plaisanterie la plus risible, c’est habituer les hommes à n’oublier jamais qu’il faut être raisonnables là même où il semble qu’on puisse se passer de la raison. […] Leur parler à tous le même langage du bon sens et leur montrer la honte des grands et des puissants qui oublient les devoirs formels attachés à leur grandeur, c’est leur apprendre qu’ils sont égaux devant la loi morale, et qu’aux yeux de Celui qui l’a dictée il n’y a de distinctions que celles acquises par l’accomplissement du devoir. […] Mais on reculerait devant les conséquences de cette thèse, si l’on ne formulait une conclusion plus précise encore, et si, devant l’œuvre du plus grand de tous les auteurs et acteurs comiques, on ne parlait de la question générale des spectacles ; car enfin, si le spectacle est absolument condamnable, Molière l’est aussi.