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198. (1914) En lisant Molière : l’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Que je puisse accepter une autre main offerte ? […] Ce qui prouve encore que Molière est toujours avec la nature, même vicieuse et honteuse, ce sont les paroles d’Angélique dans George Dandin : « Je veux jouir, s’il vous plaît, de quelque nombre de beaux jours que m’offre la jeunesse et prendre les douces libertés que l’âge me permet. » Le voilà, dit-on, cri de la nature, le voilà bien. « Suivons donc la nature, voilà pour Molière la règle des règles, j’entends celle qui règle les autres et à laquelle, donc, il faut qu’on les rapporte toutes. » Il y a peut-être quelque exagération ou quelque écart à supposer que Molière a choisi Angélique pour être l’interprète le plus fidèle et truchement le plus exact de sa philosophie et pour formuler la règle des règles. […] « Il n’oublie pas de tirer avantage de l’aveuglement de son ami.et de la prévention où il l’a jeté en sa faveur : tantôt il lui emprunte de l’argent, tantôt il fait si bien que cet ami lui en offre ; il se fait reprocher de n’avoir pas recours à ses amis dans ses besoins ; quelquefois il ne veut pas recevoir une obole sans donner un billet qu’il est bien sûr de ne jamais retirer ; il dit une autre fois et d’une certaine manière que rien ne lui manque, et c’est lorsqu’il ne lui faut qu’une petite somme. […] Elle demande seulement à Tartuffe, pour s’offrir le spectacle de sa figure, s’il ne craint pas qu’elle ne fasse confidence à son mari des désirs dont Monsieur Tartuffe veut bien l’honorer, et comme Tartuffe la supplie d’être assez bénigne pour n’en rien faire, elle l’assure qu’elle n’en fera rien en effet, à la condition qu’il renonce à son projet de mariage avec Mariane. […] Elle va droit à l’amour la première fois qu’il s’offre et serait bien incapable de n’y pas aller, encore plus d’aller ailleurs.

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