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189. (1900) Molière pp. -283

Peut-être ils nous diront que le Molière qui, dans ces pages ressuscitées, leur est offert, n’est plus celui qu’ils ont l’habitude d’entendre célébrer par la voix publique et par les juges compétents, d’accord avec elle, celui qu’eux-mêmes, pour leur compte, ont appris à connaître et à aimer, ou du moins qu’il en diffère notablement et s’en éloigne par certains traits et par l’ensemble ; que, sans être diminué, ils en conviendront sans peine, ni rabaissé, c’est là pourtant en somme, le Molière de J. […] Cette fois, en effet, au lieu de l’écrivain que l’on connaît, de l’irréprochable, de l’impeccable écrivain, dont on sait la langue constamment exemplaire et définitive, la verve serrée, l’essor hardi, mais toujours sûrement réglé, nous offrons un autre J. […] George Dandin n’est rien, absolument rien devant Sotenville, qui offre si galamment à Clitandre le divertissement de courir le cerf avec lui. […] Eh bien, oui, il agit non seulement sur les sentiments de la vie domestique, mais sur toutes nos passions ; et, en France notamment, il s’est accompli, non seulement dans la vie publique, mais dans la vie privée et dans les affections privées, une série de révolutions insensibles, et cependant si profondes, qu’il arrive souvent que nous avons peine à nous reconnaître dans nos aïeux, quand quelque document historique ou littéraire nous en offre le portrait fidèle. […] Ils nous offriront à la lecture une autre espèce d’intérêt qui nous échapperait au théâtre où nous songeons trop à chercher un divertissement, pour faire l’effort de nous instruire.

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