On a imaginé les entr’actes pour donner le temps aux Auteurs de dépêcher derriere le théâtre une intrigue qui ne pourroit qu’offrir des longueurs ou des choses minutieuses & funestes aux plus essentielles, si on les faisoit passer sans distinction sous les yeux du spectateur : par conséquent le poëte a le plus grand tort quand, n’employant pas des moments si précieux, il reprend tout uniment au commencement d’un acte la fable où il l’avoit laissée à la fin du précédent. […] Un peintre habile offre aux yeux le beau côté de son modele & les traits qu’il croit le plus propres à frapper les connoisseurs, à parer l’ordonnance de son tableau, à en caractériser chaque partie & l’ensemble : un Auteur ingénieux met en action ce qu’il croit plus digne d’être offert aux yeux du spectateur, de captiver plus agréablement son imagination, de concourir à la beauté de ses scenes, de sa piece, & jette dans les entr’actes les redites qui seroient ennuyeuses à entendre, & les actions qui ne seroient pas agréables à voir ; par conséquent on ne sauroit trop louer la prudence des poëtes qui placent derriere la toile les déclarations amoureuses, quand elles doivent être fades, les collations, les donations, & mille autres ressorts très nécessaires à la comédie, mais très ennuyeux à voir. […] Je l’ai désigné entre chaque acte. » L’Auteur a raison ; l’action doit toujours être en mouvement & lier tous les actes les uns aux autres : mais si on ne veut plus donner le temps au spectateur de se délasser, & s’il doit avoir sous les yeux une action continuelle, pourquoi ne pas lui offrir la chose qui l’intéresse, & non ce qui l’indique simplement ?