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133. (1705) La vie de M. de Molière pp. 1-314

D’ailleurs il n’aimait pas le nombre, ni la gêne, il n’avait rien pour s’amuser et s’étourdir sur ses déplaisirs. […] Le Portier se défendit pendant quelque temps ; mais enfin étant obligé de céder au nombre, il leur jeta son épée, se persuadant qu’étant désarmé, ils ne le tueraient pas : le pauvre homme se trompa. […] Mais qu’il y avait un nombre infini de malheureux, qui tous les jours abusant de leur nom, et de la bando[u]lière de Messieurs les Gardes-du-Corps, venaient remplir le Parterre, et ôter injustement à la Troupe le gain qu’elle devait faire ; Qu’il ne croyait pas que des Gentilshommes qui avaient l’honneur de servir le Roi dussent favoriser ces misérables contre les Comédiens de Sa Majesté : Que d’entrer à la Comédie sans payer n’était point une prérogative que des personnes de leur caractère, dussent si fort ambitionner, jusqu’à répandre du sang pour se la conserver. […] Au mois de Novembre de la même année 1670, que l’on représenta le Bourgeois Gentilhomme à Paris, le nombre prit le parti de cette pièce. […] L’estime, les bienfaits dont le Roi l’a toujours honoré, les Personnes avec qui il avait lié amitié, le soin qu’il a pris d’attaquer le vice et de relever la vertu dans ses ouvrages, l’attention que l’on a eue de le mettre au nombre des hommes illustres, ne doivent plus laisser lieu de douter que je ne vienne de le peindre tel qu’il était ; et plus les temps s’éloigneront, plus l’on travaillera, plus aussi on reconnaîtra que j’ai atteint la vérité, et qu’il ne m’a manqué que de l’habileté pour la rendre Le lecteur qui va toujours au-delà de ce qu’un Auteur lui donne, sans réfléchir sur son dessein, aurait peut-être voulu que j’eusse détaillé davantage le succès de toutes les pièces de Molière, que je fusse entré avec plus de soin dans le jugement que l’on en fit dans le temps.

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