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12. (1772) De l’art de la comédie. Livre premier. De ses différentes parties (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE II. De l’Etat, de la Fortune, de l’Age, du Rang, du Nom des Personnages. » pp. 39-75

De là résultent le comique, le moral, l’intérêt même, & plusieurs autres qualités d’un drame. […] Qu’on enleve à Ariste sa robe, son état ; qu’on en fasse un bon gentilhomme, comme il en est, qui se font un plaisir de mettre fin aux différends de leurs vassaux, & qu’on traite le même sujet, la plus grande portion du comique & du moral de la piece sera enlevée : les détails même ne pourront avoir rien d’aussi saillant ; & Ariste deviendra bien moins intéressant. […] Sans cela, plus de combats dans l’esprit du Glorieux, entre sa vanité & la nécessité d’épouser un riche parti ; plus de morgue dans le financier qui, malgré sa roture, prétend, graces à sa fortune, avoir le droit de traiter de pair à compagnon un pauvre gentilhomme ; plus de scenes comiques & morales entre eux deux. […] Par conséquent le Joueur de Regnard, qui n’est pas maître du bien de son pere, puisqu’il vit encore, qui n’a pas de fortune par lui-même, qui n’a pu parvenir à devoir que quatre ou cinq mille livres, qui enfin, comme le dit Regnard lui-même, n’est qu’un petit brelandier, peut alarmer seulement les écoliers qui voudroient risquer leur quartier, & n’est moral que pour eux. […] Il est aisé de voir, dans nombre de nos pieces, que leurs Auteurs se sont donné beaucoup de peine pour choisir les noms de leurs personnages, & qu’ils ont cru par-là ajouter beaucoup au comique ou au moral de leur ouvrage.

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