Quelques-uns font d’Alceste un janséniste, la personnification de l’honnêteté publique, indignée des mœurs du temps. […] … Or, il existe une seconde édition de la lettre ; mais il s’y trouve une légère variante de la phrase qui jette un si grand jour sur les mœurs et les habitudes de La Bruyère, et cette variante, qui est la bonne leçon, la voici : Quant aux circonstances du Passé…, etc. […] « Son dessein, dit-il, est de peindre les mœurs sans vouloir toucher aux personnes, et tous les personnages qu’il représente sont des personnages en l’air, et des fantômes proprement, qu’il habille à sa fantaisie, pour réjouir les spectateurs… Si quelque chose était capable de le dégoûter de faire des comédies, c’était les ressemblances qu’on y voulait toujours trouver… Car pourquoi vouloir, je vous prie, appliquer tous ses gestes et toutes ses paroles et chercher à lui faire des affaires en disant hautement : Il joue un tel, lorsque ce sont des choses qui peuvent convenir à cent personnes ? […] C’est ce qui a été examiné dans un livre récent, l’Enigme d’Alceste, et l’auteur, qui est un ferme partisan du préjugé qui fait du Misanthrope un personnage tragique, a dépensé beaucoup d’érudition et de dialectique pour démontrer qu’Alceste est un mythe, une incarnation, comme Vichnou ou Rama ; que dans ce xviie siècle, beaucoup trop admiré, plus admiré que connu, après cette horrible Fronde, dont le côté frivole a si longtemps caché le côté funeste, en face du pays épuisé, de la noblesse vendue, de la justice achetée, des mœurs corrompues, des hypocrisies florissantes, Alceste, dit M. du Boulan, Fauteur du livre que je viens de désigner, a été l’expression, mieux que cela, « l’explosion « de l’honnêteté publique se personnifiant « dans un janséniste ». […] Autres temps, autres mœurs.