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82. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Plus vous étudierez les maîtres et les disciples venus après eux, —  pater et juvenes patre digni , et plus vous trouverez qu’ils obéissent au même art poétique, où il est enseigné que la poésie est une imitation des actions, des paroles et des mœurs de nos semblables ; que cette imitation, pour être exacte et fidèle doit être conforme aux mœurs et aux usages des temps dont on parle, et que c’est justement dans la juste expression des caractères que les poètes font paraître cet art de l’imitation qui est un art si charmant, lorsqu’il est fidèle et complet ; même le mensonge est agréable s’il a les apparences de la vérité. […] « Cornus iste bonæ ætatis tyrannus est ; deliciis capit animos ut enervet 9. » Cette définition de la comédie est plus vraie et plus sincère que la fameuse définition de Santeuil : « Elle corrige les mœurs en riant. » Or, la comédie a-t-elle jamais corrigé personne ? […] Alors, comme en ceci l’imitation est plus agréable et plus facile que la censure, on ouvre assez volontiers son âme à ces corruptions décevantes, et le rire même est une introduction à ces plaisirs corrupteurs, « Tunc etiam per voluptatem facilius vitia surrepunt. » C’est encore du beau et bon Sénèque ; il conclut ainsi qu’il n’y a rien de plus dangereux pour les bonnes mœurs que l’habitude et l’abus des spectacles11.

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