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200. (1802) Études sur Molière pp. -355

On peut, en lisant la satire d’Horace, se convaincre que Molière l’a imitée, cependant, lorsque nous voyons jouer la première scène des Fâcheux, nous reconnaissons les mœurs du temps qui la vit naître ; aucun air étranger ne laisse soupçonner son antique origine à ceux qui ne la connaissent pas ; et voilà ce qui distingue l’imitateur du plagiaire. […] La Critique de l’École des femmes, disent les personnes difficiles, ou celles qui affectent de l’être, n’est pas une comédie, mais un dialogue ; c’est au lecteur à répondre et à dire : j’ai remarqué dans cet ouvrage des caractères fortement dessinés, et des scènes animées, non seulement par une conversation vive, agréable, mais encore par une gradation de chaleur soutenue jusqu’au dénouement ; j’y ai vu partout la peinture des mœurs du temps : que faut-il de plus dans une pièce, d’un acte surtout, pour mériter d’être appelée une comédie ? […] Tant de bons procédés auraient dû attacher pour toujours l’auteur des Frères ennemis à Molière ; et l’acteur, dont celui-ci va former les mœurs et les talents, n’aurait pu que rendre cette union plus durable, plus utile. […] Le ridicule versé à pleines mains sur la chicane ; le plus beau plaidoyer contre la plaidoirie ; des moralités qui, d’après l’auteur de La Philosophie de l’esprit, font regarder le théâtre de Molière comme l’école, comme le modèle de toutes les nations policées et l’excuse du libertinage ; un fourbe se permettant les atrocités les plus fortes ; un fils souffrant que des fripons volent, frappent son père, ce qui a porté vraisemblablement Jean-Jacques à soutenir que le théâtre de Molière était une école de vices et de mauvaises mœurs.

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