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151. (1747) Notices des pièces de Molière (1666-1669) [Histoire du théâtre français, tome X] pp. -419

Comme il a pris la figure de Sosie, c’est sur ce malheureux esclave que tombe toute la vengeance d’Amphitryon ; cependant les chefs de l’armée, que Jupiter, pour se défaire de Sosie, a fait inviter à dîner, voyant deux Amphitryons, ne savent de quel parti se ranger. […] Molière, qui aimait fort la harangue, sut en faire une à la tête des gendarmes ; et leur dit, que ce n’était pour eux, ni pour les autres personnes qui composaient la maison du roi, qu’il avait demandé à Sa Majesté un ordre pour les empêcher d’entrer à la comédie ; que sa troupe serait toujours ravie de les recevoir quand ils voudraient les honorer de leurs présences, mais qu’il y avait un nombre infini de malheureux, qui tous les jours abusant de leurs noms, et de la bandoulière de messieurs les gardes du corps, venaient remplir le parterre et ôter injustement à la troupe le gain qu’elle devait faire ; qu’il ne croyait pas que des gentilshommes, qui avaient l’honneur de servir le roi, dussent favoriser ces misérables contre les comédiens de Sa Majesté ; que d’entrer à la comédie sans payer n’était point une prérogative que des personnes de leurs caractères dussent si fort ambitionner, jusqu’à répandre du sang pour se la conserver ; qu’il fallait laisser ce petit avantage aux auteurs et aux personnes qui, n’ayant pas le moyen de dépenser quinze sols, ne voyaient le spectacle que par charité, s’il m’est permis, dit-il, de parler de la sorte.

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