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116. (1772) De l’art de la comédie. Livre quatrième. Des imitateurs modernes (1re éd.) [graphies originales] « CHAPITRE XIX & dernier. Des causes de la décadence du Théâtre, & des moyens de le faire refleurir. » pp. 480-499

Vous avez beau dire que rien n’est plus ridicule que cette diversité de sentiments si opposés les uns aux autres : vous avez beau faire voir combien il est absurde qu’un ouvrage de génie, sur lequel les gens de l’art peuvent à peine prononcer après l’avoir examiné à tête reposée, soit condamné à l’oubli sur une simple lecture faite en l’air dans une assemblée tumultueuse : vous avez beau vous écrier que vous ne comprenez pas comment des personnes, fort aimables d’ailleurs, mais qui étoient avant-hier occupées de toute autre chose que de la comédie, peuvent aujourd’hui, moyennant leur ordre de réception, avoir acquis tout de suite la connoissance nécessaire pour juger les productions de l’art le plus compliqué & le plus étonnant56 : vous avez beau représenter modestement que vous pouvez avoir mal lu, que vos juges peuvent s’être trompés comme ceux qui refuserent jadis la Mélanide de la Chaussée, l’Œdipe de M.  […] Enfin vous obtenez les honneurs de la représentation : mais l’un des Acteurs est mécontent de son rôle, ou peut-être ne le sent-il point ; en conséquence il le rend mal, n’y fait aucune sensation ; la piece déplaît, & le public vous attribue votre chûte. […] De cette façon, une piece mal jugée par les Comédiens, & préparée à grands frais, ne risqueroit pas de leur faire perdre leur belle saison, & les bonnes nouveautés se succéderoient sans intervalle.

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