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211. (1856) Molière à la Comédie-Française (Revue des deux mondes) pp. 899-914

Lors même qu’on arriverait à me prouver que les comédiens d’aujourd’hui ont reçu les révélations de leurs devanciers immédiats, et qu’on remonterait ainsi, preuves en main, par une suite non interrompue de confidences, jusqu’aux dernières années du règne de Louis XIV, il resterait à établir que le secret, en passant de bouche en bouche, est demeuré ce qu’il était au premier jour, que les acteurs qui ont joué pour la première fois les ouvrages de Corneille, de Racine et de Molière, qui ont reçu leurs conseils et profité de leurs leçons, ont pu les transmettre sans les altérer. […] Si Arnolphe trompé sait qu’il est justement trompé, pourquoi Agnès, chargée d’un rôle d’ingénue, n’imiterait-elle pas son exemple, et ne dirait-elle pas au public par son regard, par son attitude : Je ne suis pas niaise, croyez-le bien ; je connais de longue main toutes les ruses pratiquées par les femmes, l’ingénuité de mon personnage n’a rien de commun avec moi ?

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