C’était un reste du goût dépravé qui avait régné depuis la renaissance des lettres, et de cette mode ancienne d’avoir dans les cours ce qu’on nommait le fou du prince. […] Ne cessons de le dire : le naturel est le charme le plus sûr et le plus durable ; c’est lui qui les fait aimer; c’est le naturel qui rend les écrits des anciens si précieux, parce que, maniant un idiome plus heureux que le nôtre, ils sentaient moins le besoin de l’esprit; c’est le naturel qui distingue le plus les grands écrivains, parce qu’un des caractères du génie est de produire sans effort; c’est le naturel qui a mis La Fontaine, qui n’inventa rien, à côté des génies inventeurs, enfin c’est le naturel qui fait que les Lettres d’une mère à sa fille sont quelque chose, et que celles de Balzac, de Voiture, et la déclamation et l’affectation en tout genre sont, comme dit Sosie, rien ou peu de chose. […] La lettre qu’elle écrit à Horace est admirable : ce n’est autre chose que le premier instinct, le premier aperçu d’une âme neuve et sensible, et la manière dont elle parle de son ignorance fait voir que cette ignorance n’est chez elle qu’un défaut d’éducation, et nullement un défaut d’esprit, et que, si on ne lui a rien appris, on n’a pas dû du moins en faire une sotte. […] Il ne put parvenir à faire jouer sa Zèlinde; mais il est curieux de voir de quelles armes se sert ce galant homme (qui fut depuis le fondateur du Mercure galant), dans une Lettre sur les affaires du théâtre. […] Quelques compliments en l’air ne vous auraient pas plus compromis que les formules qui finissent une lettre; c’est une monnaie dont tout le monde sait la valeur, et l’on n’est pas un fripon pour s’en servir.