Ces deux derniers partagèrent l’admiration de leur professeur pour Lucrèce, et entreprirent dans la suite d’en faire passer les beautés dans notre langue. […] D’Avisson, médecin écossais, qui s’était acquis beaucoup de connaissances dans les lettres aussi bien que dans l’usage de notre langue, en avait parlé plusieurs fois de la sorte. » Ce passage, ignoré de tous ceux qui se sont occupés de la vie ou des ouvrages de Molière, renferme, sinon la preuve de la modestie de l’abbé de Marolles, du moins le seul témoignage que l’on tienne d’un contemporain ayant vu quelque chose de cette traduction perdue. […] Le plus souvent ils ne s’exprimaient qu’en latin ; quand ils daignaient se servir de la langue française, ils la défiguraient par des tournures scolastiques qui la rendaient presque inintelligible. […] Mais s’il lui restait encore quelque ombre de pudeur, ne lui serait-il pas fâcheux d’être en butte à tous les gens de bien, de passer pour un libertin dans l’esprit de tous les prédicateurs, et d’entendre toutes les langues que le Saint-Esprit anime déclamer contre lui dans les chaires et condamner publiquement ses nouveaux blasphèmes ? […] Né au commencement de 1622, c’est-à-dire près de dix-huit ans avant Racine, et mort en 1673, il ne put écrire comme cet auteur ni comme Bossuet, qui mirent à profit tous les progrès de la langue.