Comme il y a des critiques, continua-t-il, qui n’approuvent jamais rien et qui entraînent les opinions de quelques gens faciles qui croiraient mal faire et devoir être raillés de ne pas témoigner qu’ils sont de leur sentiment, bien qu’ils n’en soient point, il y en a d’autres qui approuvent tout ce qu’ils voient : je connais un des plus galants Abbés du siècle, et à qui je puis, sans injustice, donner le nom d’obligeant, puisque, par une bonté naturelle, il loue indifféremment tous les ouvrages qu’il voit et tous ceux que l’on lui montre en particulier ; aussi dit-on de lui dans le monde que l’on ne saurait connaître s’il dit la vérité et qu’il ne fait point de Jaloux, puisqu’il met tous les auteurs en même degré et qu’il loue également leurs productions en public et en particulier, sans crainte de hasarder sa gloire. […] Le peu de succès qu’a eu son Don Garcie ou le Prince jaloux m’a fait oublier de vous en parler à son rang. […] — Tout ce que vous venez de dire est véritable, repartit Clorante ; mais si vous voulez savoir pourquoi presque dans toutes ses Pièces il raille tant les Cocus et dépeint si naturellement les Jaloux, c’est qu’il est du nombre de ces derniers. […] Mais il voudrait faire en sorte, par le moyen de ses Pièces, que tous les hommes pussent devenir jaloux et témoigner leur jalousie sans être blâmés, afin de pouvoir faire comme les autres et témoigner la sienne sans crainte d’être raillé.