Pendant que le père Poquelin lui imposait des études de religion et de prêtrise, le grand-père Louis Cressé lui réservait, aux jours de sortie et pendant les vacances, des distractions de toute autre sorte : il le menait à l’Hôtel de Bourgogne, où se donnaient tragédies et comédies ; au Théâtre de la troupe italienne, où Scaramouche, qu’il devait tant imiter plus tard, jouait et mimait ses merveilleuses farces ; ou bien encore au Pont-Neuf, devant ces tabarinades, où nous l’avons déjà surpris. […] On vous dira que, cette fois, Molière imite le Phormion de Térence ; soit, mais croyez qu’il obéit surtout à ses souvenirs. […] Le gamin ne s’en tenait pas là ; lorsqu’il voyait passer quelque soldat au blanc uniforme, il imitait le cri du moineau, qui s’appelle aussi un pierrot, il faisait piou piou ; de là le sobriquet donné encore aux soldats d’infanterie. […] Ayant à parler du Médecin volant, dans leur Histoire de l’ancien Théâtre italien, ils ne dirent mot de la farce de Molière et ne semblèrent même pas en soupçonner l’existence ; qui plus est, croyant nouvelle la pièce italienne que Molière avait lui-même imitée pour cette parade, ils s’imaginèrent que son Médecin malgré lui, dont elle est un des points de départ, avait été imité par les Italiens. […] Le tout n’est pas, lorsqu’on imite quelqu’un, disait Rivarol, le tout n’est pas de le voler : il faut tuer son homme.