Les uns disent que non; les autres disent qu’oui : et moi je dis que oui et non ; d’autant que l’incongruité des humeurs opaques, qui se rencontrent au tempérament naturel des femmes, étant cause que la partie brutale veut toujours prendre empire sur la sensitive, il voit que l’inégalité de leurs opinions dépend du mouvement oblique du cercle de la lune.... etc. » Toutefois, ce n’était encore là qu’un essai timide: la fantaisie comique devait se déployer bien plus à l’aise et bien plus riche dans quelques-unes des dernières pièces de Molière, Le Bourgeois gentilhomme, par exemple, et la dernière de toutes, Le Malade imaginaire, qui se termine par de véritables fusées de folle et d’étourdissante gaîté. […] Avec cette innocente vision, elle est heureuse; elle sera même au besoin une rivale fort arrangeante, et prête à dégager ses amants imaginaires de la parole qu’ils ne lui ont jamais donnée; mais malheur à qui osera porter la main sur ses chimères. […] Il faut réunir tout le théâtre de Molière, considérer à la fois le Tartuffe, Le Misanthrope, l’Amphytrion, Le Festin de Pierre, Le Malade imaginaire, et bien d’autres pièces, si l’on veut jouir de perspectives aussi vastes. […] Dans Andromaque, Racine nous dérobe ce qui fait la joie de la veuve d’Hector; dans Le Malade imaginaire, Molière expose hardiment tout ce qui fait la joie de son héros (je dis la joie, car Argant est un de ces malades qui vivent de leurs maux, et qui mourraient s’ils avaient le malheur de guérir); il nous le présente avec tous les attributs de son état, bonnet de nuit, robe de chambre, chaise longue, drogues et comptes d’apothicaire.