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127. (1819) Notices des œuvres de Molière (III) : L’École des femmes ; La Critique de l’École des femmes ; L’Impromptu de Versailles ; Le Mariage forcé pp. 164-421

Tandis qu’une foule d’envieux essayaient de troubler, par le concert de leurs censures ineptes, un succès dont l’éclat les désespérait, Boileau, non moins ardent à venger le génie des outrages de la médiocrité, qu’à punir la médiocrité elle-même de ses insolentes prétentions et de ses honneurs usurpés, Boileau adressait des vers consolants à Molière importuné par les détracteurs de son École des femmes, comme il en adressa dans la suite à Racine trop affligé des critiques qu’essuyait sa Phèdre. […] Je la dis, cette idée, dans une maison où je me trouvai un soir ; et d’abord une personne de qualité, dont l’esprit est assez connu dans le monde, et qui me fait l’honneur de m’aimer, trouva le projet assez à son gré, non seulement pour me solliciter d’y mettre la main, mais encore pour l’y mettre lui-même, et je fus étonné que, deux jours après, il me montra toute l’affaire exécutée d’une manière, à la vérité, beaucoup plus galante et plus spirituelle que je ne puis faire, mais où je trouvai des choses trop avantageuses pour moi ; et j’eus peur que, si je produisais cet ouvrage sur notre théâtre, on ne m’accusât d’abord d’avoir mendié les louanges qu’on m’y donnait. » Je soupçonne que l’ouvrage ne parut pas à Molière tout à fait aussi galant et aussi spirituel qu’il le dit ici ; qu’il y vit quelque autre défaut que d’être trop flatteur pour lui, et que la crainte de paraître manquer de modestie fut moins le motif qui l’empêcha d’en faire usage, que le prétexte qui lui servit pour s’en dispenser. […] Elle est fort indigne de cet honneur et n’en jouit plus depuis longtemps. […] Du reste, il contrefait aussi le jeu de Molière, qui lui avait fait l’honneur de contrefaire le sien, et prétend, comme Montfleury, que la parodie des comédiens de l’hôtel, dans L’Impromptu de Versailles, n’est qu’une facétie usée, dont l’auteur payait depuis longtemps son écot à la table des grands. […] Palissot, abusa de la vengeance. » Sans me livrer, pour la défense de Molière, à des récriminations trop faciles, qui d’ailleurs ne décideraient point la question, je me bornerai à dire qu’il ne fut point l’agresseur ; que, s’il blessa cruellement l’amour-propre de Boursault, qui l’avait provoqué, il ne porta pas du moins la plus légère atteinte à son honneur, et qu’en cela il fit preuve d’une modération dont son ennemi ne lui avait point donné l’exemple.

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