Elle avait donc treize ans quand elle « créa » une Grâce dans Psyché, quinze à la mort de Molière, qui faisait venir, — comme on sait, — les enfants de ses camarades à la lecture de ses pièces. […] Quoi qu’il en soit, le succès de Moliere anima la jalousie des auteurs médiocres ; on disoit sur quelques-unes de ses pièces, que c’étoient des sujets empruntez, ce qui est vrai dans un sens ; mais il faut avouer que la manière dont il traitoit ses sujets avoit autant de grâce et de nouveauté que les sujets même qui étoient de son invention. […] Elle avoit la taille mediocre, mais un air engageant, quoiqu’avec de très petits yeux, une bouche fort grande et fort plate, mais faisant tout avec grâce, jusqu’aux plus petites choses, quoiqu’elle se mît très-extraordinairement, et d’une maniéré presque toujours oposée à la mode du temps. […] On n’avoit point encore vu de si parfait comédien dans la troupe royale de l’Hôtel de Bourgogne, dont il étoit l’orateur ; il annonçoit de bonne grâce, parloit facilement, et ses petits discours faisoient toujours plaisir à entendre par les traits nouveaux dont il prenoit soin chaque jour de les orner. […] Cet acteur avoit tous les talens imaginables pour le théâtre dont il a été la gloire dans son temps ; il avoit beaucoup de noblesse dans l’air et dans les manières ; il étoit fort aimé de toute la Cour, et particulièrement connu du feu Roy, de qui il avoit reçû plusieurs grâces, pour lui en son particulier, et pour la troupe en général.