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53. (1746) Notices des pièces de Molière (1661-1665) [Histoire du théâtre français, tome IX] pp. -369

      Aujourd’hui, mes soins, mes travaux, N’iront qu’à discourir de Vaux, ………………………………… Mercredi* dernier étant donc, En ce lieu beau, s’il en fut onc, Le roi, l’illustre reine mère, Monseigneur d’Orléans son frère, Et Madame pareillement, Y vinrent par ébattement, Suivis d’une cour si brillante, Ou (pour mieux dire) si galante, Que Phébus, au chef radieux, Phébus le plus charmant des dieux, Avec ses clartés immortelles, N’en éclaira jamais de telles ; Là cent objets miraculeux, De grands princes, des cordons, Tous gens choisis, et d’importance, Bref, la fleur de toute la France, Arrivèrent en bel arroi, Avec notre cher et grand roi, Que ce fameux et beau génie, De sagesse presque infinie, Monsieur Fouquet, surintendant, En bon sens toujours abondant, Ainsi qu’en toute politesse, Reçut avec grande allégresse, Et son aimable épouse aussi, Dame, où l’on ne trouve aucun si, Que le Ciel bénisse et conserve, Et qui comme une autre Minerve, A des vertus et des appas, Que bien des déesses n’ont pas ; Le monarque ensuite et le reste, De sa cour ravissante et leste, Ayant traversé la maison, De tous biens garnie à foison, Pour y faire chère plénière, Adressa sa marche première, Dans l’incomparable jardin, Où l’on ne voit rien de gredin, Mais dont les très larges allées, Dignes d’être des dieux foulées, Les marbres extrêmement beaux, Les fontaines, et les canaux, Les parterres, les balustrades, Les rigoles, jets d’eau, cascades, Au nombre de plus d’onze cent, Charment et ravissent les sens. […] L’auteur de L’École des femmes : je demande pardon, si je parle de cette comédie, qui vous fait désespérer, et que vous avez essayé de détruire par votre cabale, dès la première représentation, l’auteur, dis-je, de cette pièce, fait conter à un de ses acteurs qu’un de ses voisins, ayant fait clore de fossés un arpent de pré, se fit appeler M. de L’Islea, que l’on dit être le nom de votre petit frère. » Dans la même dissertation, l’abbé d’Aubignac parle encore du chagrin de M.  […] Un jaloux charmé d’un objet Ravissant et de belle taille, Veut l’épouser vaille que vaille ; Ou du moins il promet cela, Aux parents de cet objet-là ; Mais connaissant que sa maîtresse, Est plus coquette que tigresse, Redoutant comme un grand méchef, Le fatal panache du chef, S’étant dégagé vers le père, Il arrive enfin que le frère, Qui paraît doux comme un mouton, Le contraint à coups de bâton, De conclure le mariage : Ce qu’il fait : dont son âme enrage. […]       Le roi, la reine, et reine mère, D’icelui roi, l’unique frère, Et l’objet de son amitié, Son aimable et chère moitié, Item, Madame la Comtesse, Goûtèrent avec allégresse, Et même avec ravissement, Ce charmant divertissement ; L’inventeur de cette machine, De bonne et française origine, Est un Troyen nommé Raisin, Pourvu d’esprit, et du plus fin, Lequel étant heureux et sage, En la fabrique de l’ouvrage, En a fait les secrets ressorts ; Qui sont deux jolis petits corps, Lesquels ravissent à merveille, Les yeux aussi bien que l’oreille : Je ne dis rien de décevant, Et j’en parle comme savant. […] Ce seigneur, pendant son séjour à la cour d’Angleterre, avait fort aimé Mlle Hamilton : leurs amours même avaient fait du bruit, et il repassait en France sans avoir conclu avec elle ; les deux frères de la demoiselle le joignirent à Douvres, dans le dessein de faire avec lui le coup de pistolet.

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