S’ils ne dominent pas la vieillesse des monarques, ils soufflent le feu de l’ambition dans le cœur des jeunes princes impatients du sceptre ; ou si un jeune roi s’affranchit de leur tutelle, ils lui opposent un frère dont ils font partout retentir les louanges, et qu’ils affectent de signaler à la piété des fidèles et à l’amour des peuples ; enfin, pour fonder leur empire, leur politique implacable et jalouse jette la division dans la famille des rois comme dans la famille des plus obscurs citoyens. […] Lisée avait un frère jumeau qu’il croit perdu, et qui lui ressemblait parfaitement. Ce frère revient à Milan, où se passe la scène, et la ressemblance des deux ménechmes complique de plus en plus l’intrigue, et produit des incidents à ne point finir. […] Vous vous êtes trompés, mes frères ; faites-moi le but de vos injures et de vos pierres, et tirez sur moi vos épées. » Cette conduite adroite de Montufar produit sur la multitude le même effet que la feinte humilité de Tartuffe sur Orgon ; l’engouement d’un peuple hébété redouble pour l’imposteur, et le trop véridique gentilhomme est obligé de se soustraire par la fuite à la vindicte publique.