Qu’on se figure Louis XIV dans sa galerie de Versailles, entouré de sa cour brillante : un Gilles couvert de lambeaux perce la foule des héros, des grands hommes et des beautés qui composent cette cour ; il leur propose de quitter Corneille et Racine pour un saltimbanque qui a des saillies heureuses et qui fait des contorsions344 ! […] S’il est aisé d’apercevoir dans une grande littérature l’empreinte du siècle et de la race qui l’ont produite ; s’il est aisé d’entendre la guerre civile s’entrechoquer dans les vers heurtés de Dante, et de contempler dans la douce figure de Béatrix la personnification, de toutes les choses rêvées par cette époque ardente, et mystique de poètes théologiens ; s’il est aisé de suivre dans le théâtre de Voltaire les préoccupations philosophiques du dix-huitième siècle, et de voir dans le Faust de Goethe l’expression du génie métaphysique et profond de l’Allemagne ; croit-on qu’il soit beaucoup plus difficile de découvrir la cause naturelle d’où procèdent les prodiges apparents, les études calmes d’un Bernardin de Saint-Pierre en 1789, les tragédies attiques d’un Goethe à Weimar ? […] Se figure-t-on la haine que ce rieur accumulait sur sa tête ?