S’il était vieux, imbécile et maussade, l’aversion d’Agnès pour lui serait toute naturelle, et il n’en résulterait aucune leçon ; mais il est dans la force de l’âge ; il est homme d’esprit et homme du monde : son infortune alors ne provient que de son faux calcul, et elle en est la juste punition. […] Lysidas, ces auteurs jaloux et pédants qui cachent leur malin vouloir sous un faux air d’impartialité, et qui dénigrent, pour la plus grande gloire des règles, l’écrivain coupable d’amuser le public qu’ils sont en possession d’ennuyer. […] Cette pièce, qui paraît ne pas avoir été représentée, n’est qu’un insipide réchauffé de toutes les critiques justes, exagérées et fausses qui avaient été faites de L’École des femmes, et une lourde réfutation de tout ce que Molière avait dit pour la défense de sa comédie. […] Connaissant tout l’avantage de l’attaque sur la défense, il songe moins à parer les coups de ses ennemis qu’à leur en porter lui-même ; il ne perd pas le temps à prouver froidement qu’ils ont eu tort en le critiquant, il fait voir qu’ils ne pouvaient avoir raison, tant leur esprit est faux, bizarre, inconséquent et rempli d’absurdes préventions ; ils ont voulu chasser L’École des femmes du théâtre, il les y traduit eux-mêmes ; ils n’ont pas voulu rire à cette pièce, il fait rire d’eux, en les peignant au naturel : ce n’est pas la vengeance d’un auteur entêté de son mérite et qui veut en convaincre les autres ; c’est celle d’un artiste, d’un homme de génie, qui peint gaiement ses ennemis ou plutôt ceux de son art, et qui pense que le meilleur argument en faveur de son talent méconnu est d’en donner une nouvelle preuve. […] C’est ainsi, par exemple, qu’un homme, possédé de la manie de se croire malade, et livré, par une suite de cette triste faiblesse, aux artificieuses caresses d’une marâtre qu’il a donnée à ses enfants, entend cette femme cupide se réjouir inhumainement à la fausse nouvelle de sa mort ; c’est ainsi qu’un petit bourgeois, qui a la sotte vanité de passer pour gentilhomme, est berné, dupé, volé par un escroc de qualité ; c’est ainsi, enfin, qu’un riche paysan, qui a fait la folie d’épouser une demoiselle, est témoin des rendez-vous nocturnes qu’elle donne à son amant.