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64. (1823) Notices des œuvres de Molière (VII) : L’Avare ; George Dandin ; Monsieur de Pourceaugnac ; Les Amants magnifiques pp. 171-571

On ne voulut pas sentir que, dans un-genre de drame destiné à peindre la vie commune, le langage mesuré ne pouvant être une condition essentielle et rigoureuse, puisqu’il établit nécessairement une différence entre l’image et le modèle, il est seulement l’objet d’une espèce de convention ou, si l’on veut, de concession aux avantages de laquelle l’artiste peut renoncer, s’il les remplace par des avantages équivalents ; que, d’ailleurs, le vers, dans nos comédies, n’est autre chose qu’une imitation de l’usage antique, et que toutefois notre vers alexandrin, le même qui sert pour l’épopée et pour la tragédie, est beaucoup moins propre à exprimer la liberté des entretiens familiers, que le système métrique des comiques grecs et latins, système large et presque irrégulier qui leur permettait d’employer des vers de toute espèce et de toute mesure, dont la structure est encore aujourd’hui un sujet de dissentiment parmi les érudits. […] Harpagon, en effet, est aussi fastueux qu’un avare peut l’être : il ne l’est point par goût, ce qui impliquerait avec son vice ; mais il l’est par une sorte de nécessité ; et cette nécessité est la gêne, la torture morale qui, si j’ose m’exprimer ainsi, fait prendre au personnage tant d’attitudes plaisantes, et donne à sa figure un jeu de physionomie si comique. […] Robinet, dans sa gazette rimée, rendant compte de la première représentation donnée au public, s’exprime en ces termes : L’original est à Paris ; En colère, autant que surpris, De l’y voir dépeint de la sorte, Il jure, il tempête et s’emporte, Et vent faire ajourner l’auteur, En réparation d’honneur, Tant pour loi que pour sa famille, Laquelle en Pourceaugnacs fourmille.

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