Subligny, dont nous aurons occasion de parler, au sujet de la tragédie d’Andromaque de M. de Racine, et de quelques autres tragédies du même auteur, Subligny, dis-je, dans un ouvrage en vers, intitulé : La Muse Dauphine a, s’exprime de la façon suivante au sujet de cette comédie : Pour changer un peu de discours, Une chose de fort grand cours, Et de beauté très singulière, Est une pièce de Molière ; Toute la Cour en dit du bien, Après son Misanthrope, il ne faut plus voir rien. […] « Toute cette pièce est traitée de la même sorte que le sieur Molière a de coutume de faire ses autres pièces de théâtre, c’est-à-dire qu’il y représente avec des couleurs si naturelles le caractère des personnes qu’il introduit, qu’il ne se peut rien voir de plus ressemblant que ce qu’il a fait, pour montrer la peine et les chagrins où se trouvent souvent ceux qui s’allient au-dessus de leur condition ; et quand il dépeint l’humeur et la manière de faire de certains nobles campagnards, il ne forme point de traits qui n’expriment parfaitement leur véritable image. […] Si l’on regarde la musique, il n’y a rien qui n’exprime parfaitement toutes les passions, et qui ne ravisse l’esprit des auditeurs. Mais ce qui n’a jamais été vu, est cette harmonie de voix si agréable, cette symphonie d’instruments, cette belle union de différents chœurs, ces douces chansonnettes, ces dialogues si tendres et si amoureux, ces échos, et enfin cette conduite admirable dans toutes les parties, où depuis les premiers récits l’on a vu toujours que la musique s’est augmentée ; et qu’enfin, après avoir commencé par une seule voix, elle a fini par un concert de plus de cent personnes, que l’on a vues toutes à la fois sur un même théâtre joindre ensemble leurs instruments, leurs voix et leurs pas, dans un accord et une cadence qui finit la pièce, en laissant tout le monde dans une admiration qu’on ne peut assez exprimer. » La suite de cette fête de Versailles ne regardant plus le genre du théâtre, nous croyons pouvoir nous dispenser d’en parler. […] « On peut voir par ces exemples combien ces métamorphoses, si je puis m’exprimer ainsi, sont surprenantes, et avec quel art le poète français a adapté à son sujet tout ce qu’il a imité ; car les copies deviennent entre ses mains des originaux, et perdent ce caractère d’imitation servile qu’il est si difficile aux auteurs de ne pas laisser dans les ouvrages dont les idées ne leur appartiennent pas.