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71. (1884) La Science du cœur humain, ou la Psychologie des sentiments et des passions, d’après les oeuvres de Molière pp. 5-136

Dans ces diverses circonstances, l’homme, n’étant plus éclairé à l’égard de ses inspirations passionnées par la raison, c’est-à-dire par les sentiments moraux, ne peut plus apprécier les bizarreries, les immoralités, que ses passions lui suggèrent ; il les prend pour raisonnables, comme étant l’expression du bien, de la justice et de la vérité. […] En soutenant dans toute leur intégrité, pendant le cours de chacune de ses pièces, les caractères bizarres, extravagants, immoraux, qu’il a dépeints, il fait voir que la folie, selon l’expression heureuse du Dr Baillarger, est une infortune qui s’ignore, et de plus il démontre que cette infortune consiste dans l’aveuglement moral de l’homme à l’égard de ses inspirations passionnées. […] Les maximes de La Rochefoucauld ne sont que trop souvent l’expression exacte de la vérité. […] Enfin, il s’en est servi une quatrième fois dans les Femmes savantes pour caractériser l’irritation qui s’empare de Belise lorsqu’elle entend que ses extravagances, qu’elle croit être l’expression de la vérité, sont qualifiées de chimères. […] S’il a démontré précédemment la toute-puissance des bons procédés pour arriver au cœur de l’homme et pour le gouverner, il n’ignore pas qu’il existe certaines natures pusillanimes, sensibles à la crainte, qu’il faut maîtriser par l’énergie, par l’ascendant moral et même momentanément par la rigueur et par les punitions ; en un mot, pour me servir d’une expression proverbiale, il n’ignore pas que, pour les faire taire, il faut crier plus fort qu’eux.

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