Cet homme, sensualiste comme un Italien, amoureux comme un Espagnol, est tour à tour, et selon la position présente, un poète, un soldat, un philosophe, un paysan, un bretteur, un dévot, un médecin, un esprit fort, un hypocrite ; il ne devient un hypocrite qu’à la fin du drame, et quand il faut absolument pousser jusqu’au bout, par cet exemple, la perversité humaine. […] Le Festin de Pierre, comédie en prose Le Tartuffe n’avait pas encore vu le jour, la protection du roi lui-même avait été vaincue par les clameurs des dévots, des vrais dévots aussi bien que des faux dévots, comme dit La Bruyère ; tout le xviie siècle était en suspens, dans l’attente du chef-d’œuvre qui allait venir, bref, on ne savait rien de Tartuffe, sinon dans les salons de mademoiselle de Lenclos, ce grand philosophe, à l’esprit si net, au cœur si tendre, lorsque tout d’un coup, dans les folles journées du carnaval de 1665, Molière fit représenter une comédie intitulée : Don Juan. — Au premier abord, on devait s’attendre à quelqu’une de ces farces admirables par lesquelles le grand poète comique faisait soutenir ses chefs-d’œuvre, Le Malade imaginaire, par exemple, ou bien Le Bourgeois gentilhomme. […] Enfin, enfin, quand la mesure est comblée de ces humiliations et de ces désespoirs, la maîtresse royale se fait carmélite ; elle se plonge dans ces austérités atroces, avec la même passion qu’elle s’est plongée dans les molles voluptés de ce siècle amoureux et dévot, puis elfe meurt comme une sainte, laissant une mémoire respectée, et se plaçant, par la vérité de son amour, à côté de cette maîtresse royale qui fut une femme courageuse et de bon conseil, Agnès Sorel !