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124. (1881) La philosophie de Molière (Revue des deux mondes) pp. 323-362

Espérons qu’on se relâchera un peu de la sévérité actuelle que, lorsque les ouvrages aujourd’hui commencés approcheront du terme, on ne craindra plus d’entreprendre quelque chose de nouveau. […] Sans doute, il ne faut pas être médiocrement libre penseur pour attaquer aussi ouvertement l’hypocrisie et pour ne pas craindre de mettre le blasphème dans la bouche de son héros. […] Célimène, c’est le monde lui-même dans ce qu’il a de plus exquis et de plus perfide, la beauté sans la bonté, l’esprit sans le cœur, la richesse et tous les dons du dehors sans aucun des dons de l’âme ; c’est l’élégance et la grâce, le bon goût irréprochable, la diction juste, fine, perçante, la repartie implacable, la cruauté enjouée, la fierté feinte : c’est la coquette idéale, usant et abusant de tous ses dons, déchirant le plus noble cœur avec une grâce homicide, victime à la fin de ses ruses, mais prête à recommencer, n’ayant rien à craindre tant qu’elle aura vingt ans.

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