Celui-ci, habile, expérimenté, fertile en ressources, voit sans cesse échouer ou plutôt tourner contre lui-même les moyens qu’il imagine pour faire cesser les accointances d’une jeune innocente et d’un jeune éventé 4, dont l’une ne lui cache rien par simplicité, et dont l’autre lui confie tout par étourderie, mais que la fortune, d’intelligence avec l’amour, semble protéger, en dépit de leur indiscrétion, contre tous les desseins d’un ennemi vigilant et bien averti : cette suite de confidences forme donc véritablement une suite de situations dramatiques, dont l’effet serait à peine égalé par tout ce que les jeux et les coups de théâtre peuvent avoir de plus vif et de plus frappant. […] Connaissant tout l’avantage de l’attaque sur la défense, il songe moins à parer les coups de ses ennemis qu’à leur en porter lui-même ; il ne perd pas le temps à prouver froidement qu’ils ont eu tort en le critiquant, il fait voir qu’ils ne pouvaient avoir raison, tant leur esprit est faux, bizarre, inconséquent et rempli d’absurdes préventions ; ils ont voulu chasser L’École des femmes du théâtre, il les y traduit eux-mêmes ; ils n’ont pas voulu rire à cette pièce, il fait rire d’eux, en les peignant au naturel : ce n’est pas la vengeance d’un auteur entêté de son mérite et qui veut en convaincre les autres ; c’est celle d’un artiste, d’un homme de génie, qui peint gaiement ses ennemis ou plutôt ceux de son art, et qui pense que le meilleur argument en faveur de son talent méconnu est d’en donner une nouvelle preuve. […] Le coup manqua cependant ; et Brécourt, jugeant que sa vie n’était pas en sûreté après la découverte d’un semblable dessein, prit sur le champ la poste et revint en France.