Dans la pièce de Chappuzeau, comme dans celle de Molière, c’est un homme dont la déclaration d’amour est fort mal reçue par une femme infatuée du bel esprit, et qui, pour se venger, introduit auprès d’elle son valet travesti en marquis magnifique et ridicule, dont les galanteries sont beaucoup mieux accueillies que celles de son maître : ce valet, démasqué et laissant sa dupe couverte de confusion, forme le dénouement commun aux deux ouvrages. […] Sans examiner si les disgrâces des maris sont plus rares ou plus communes qu’elles ne l’étaient autrefois, on peut douter que cet éternel sujet des plaisanteries de nos vieux comiques fût aussi bien reçu aujourd’hui sur la scène, qu’il l’était alors ; et ce qu’il y a de certain, c’est que, dans le langage décent, il n’y a plus de terme pour exprimer ce que Sganarelle croyait être. […] Une ou deux ressemblances fort légères entre deux ouvrages puisés à une source commune, n’autorisent point cette opinion, et d’ailleurs les deux représentations furent tellement rapprochées que Molière n’eût pas eu le temps de s’approprier une seule des idées de son devancier. […] Molière, justement impatienté, lui fit dire par Boileau, leur ami commun, qu’il eût à démentir un peu plus sérieusement cette opinion fausse et ridicule, s’il ne voulait que Molière lui-même entreprît de la détruire, en montrant cette misérable scène de Caritidès, où il n’y avait pas un seul trait de bonne plaisanterie7.