Si, malgré cet objet qui vous a pu surprendre, Prince, vous me rendez ce que vous devez rendre, Et ne demandez pas d’autre preuve que moi Pour condamner l’erreur du trouble où je vous vois ; Si de vos sentiments la prompte déférence Veut, sur ma seule foi, croire mon innocence, Et de tous vos soupçons démentir le crédit, Pour croire aveuglément ce que mon cœur vous dit, Cette soumission, cette marque d’estime, Du passé, dans ce cœur, efface tout le crime : Je rétracte à l’instant ce qu’un juste courroux M’a fait, dans la chaleur, prononcer contre vous ; Et, si je puis un jour choisir ma destinée, Sans choquer les devoirs du rang où je suis née, Mon bonheur, satisfait par ce respect soudain, Promet à votre amour & mes vœux & ma main. […] Si cette offre sur vous obtient si peu d’empire Que vous me refusiez de me faire, entre nous, Un sacrifice entier de vos transports jaloux ; S’il ne vous suffit pas de toute l’assurance Que vous peuvent donner mon cœur & ma naissance, Et que de votre esprit les ombrages puissants Forcent mon inconstance à convaincre vos sens, Et porter à vos yeux l’éclatant témoignage D’une vertu sincere à qui l’on fait outrage, Je suis prête à le faire, & vous serez content : Mais il vous faut de moi détacher à l’instant, A mes vœux pour jamais renoncer de vous-même ; Et j’atteste du Ciel la puissance suprême, Que, quoi que le destin puisse ordonner de nous, Je choisirai plutôt d’être à la mort qu’à vous.